Avocats : est-il possible de se domicilier ou de travailler dans un centre d'affaires ?

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Avocats : est-il possible de se domicilier ou de travailler dans un centre d'affaires ?

La conclusion d'un contrat de domiciliation pour un avocat parisien exige qu'il soit conforme à l'annexe XIV-C du règlement intérieur du barreau de Paris. Cette annexe stipule que le bureau mis à disposition doit répondre à plusieurs critères cumulatifs : il doit être à temps complet, privatif, exclusif et fermant à clef.  

Toutefois, pour faciliter l'organisation des locaux par le prestataire centre d'affaires, il est toléré de modifier l'attribution du bureau de l'avocat en lui accordant un délai de préavis d'au moins un mois. 

Une barrière à l'entrée pour les jeunes avocats

L'exigence de louer un bureau à temps plein constitue une barrière à l'entrée pour les jeunes avocats. En effet, cela implique que les jeunes avocats doivent prendre en charge des frais fixes (les loyers) au lieu de pouvoir exercer leur profession de manière flexible et économique en louant un espace de travail adapté au gré de leurs rendez-vous clients. Cette exigence peut donc rendre le lancement de leur activité plus difficile. 

Le règlement empêche la profession d'entrée dans l'ère du travail flexible

Le règlement qui impose la location d'un bureau à temps plein et en frais fixes empêche la profession d'avocat d'entrer dans l'ère du travail flexible. Le travail flexible est une tendance croissante dans de nombreux domaines professionnels, permettant aux travailleurs d'adapter leur emploi du temps et leur lieu de travail en fonction de leurs besoins et de leurs préférences. Cependant, l'exigence de louer un bureau en frais fixes limite la flexibilité des avocats en les obligeant à payer pour un espace de travail permanent, même s'ils n'en ont pas besoin à temps plein. Cela peut rendre difficile pour les avocats de jongler entre différents clients, de travailler à distance ou de bénéficier d'un horaire de travail plus flexible. 

Un arrêt de la cour de cassation qui change tout ?

Si certains avocats utilisent déjà des centres d’affaires pour rencontrer leurs clients et travailler, d'autres pensent que cela va à l'encontre des règles de la profession, même en usage ponctuel. 

La Cour de cassation a récemment pris une décision sur cette question ; les avocats peuvent travailler dans des centres d'affaires tant qu'ils ont un endroit où ils peuvent recevoir leurs clients en privé et en toute confidentialité. 

Rappel des faits : en 2015, une avocate a été sanctionnée par le conseil de discipline des avocats de l'ordre du barreau de Paris avec une interdiction d'exercer la profession pendant deux ans, en raison d'une violation des dispositions du règlement intérieur concernant le domicile professionnel. Cependant, en 2021, la cour d'appel de Paris a estimé que la violation des dispositions en question n'était pas prouvée et a réduit la sanction à une interdiction temporaire d'un an, dont six mois avec sursis. 

Le bâtonnier de Paris a fait appel de cette décision, mais la Cour de cassation a rejeté le pourvoi dans un arrêt rendu le 14 décembre 2022 (pourvoi n° 21-17.141). La Cour de cassation a pris en compte le fait que l'avocate recevait tous les courriers liés aux procédures de contrôle de compatibilité et disciplinaires dans le centre d'affaires où elle avait loué un bureau. De plus, elle avait la possibilité de recevoir ses clients dans un espace confidentiel, disposait d'une ligne téléphonique et d'un service de transfert de courrier. La Cour de cassation a conclu que l'avocate avait un domicile professionnel effectif garantissant le respect des principes essentiels de la profession, tels que la dignité, l'indépendance et le secret professionnel. 

Ainsi, la Cour de cassation a confirmé la décision de la cour d'appel et rejeté le pourvoi du bâtonnier de Paris. 

Et pourtant

Et pourtant, malgré cette décision de la Cour de cassation, est-ce que la profession est prête à ce changement de paradigme quant à l’usage des bureaux ? Qui pour moderniser le règlement et clarifier la situation des avocats travaillant dans des centres d'affaires ?

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