Le redressement judiciaire

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Le législateur a mis en place plusieurs dispositifs permettant d’aider les entreprises en difficultés. Parmi ces dispositifs, le redressement judiciaire a pour objectif de faciliter la réorganisation de l’entreprise afin de permettre la poursuite de l’activité économique, le maintien de l’emploi et l’apurement du passif.

Cette procédure est obligatoire pour toute entreprise en cessation des paiements et dont le redressement est encore possible. Elle peut donner lieu à l'adoption d'un plan de redressement à l'issue d'une période d'observation, pendant laquelle un bilan économique et social de l'entreprise est réalisé.

Conditions d'ouverture de la procédure

Contrairement à la sauvegarde, il s'agit d'une procédure obligatoire pour tout débiteur en état de cessation des paiements et dont le redressement n'est pas manifestement impossible.

La procédure de redressement judiciaire est applicable à toute personne exerçant une activité commerciale ou artisanale, ou autre personne physique exerçant une activité professionnelle indépendante (y compris une profession libérale), à l’exception des syndicats de copropriété. Dans le cas d'une EIRL en difficulté, les dispositions régissant la procédure de redressement judiciaire ne s'appliquent qu'au patrimoine faisant l'objet de cette demande.

Les étapes de la procédure

Ouverture de la procédure

La procédure peut être ouverte à la demande :

  • du débiteur, dans les 45 jours suivant la cessation des paiements
  • d'un créancier
  • du procureur de la République.

La procédure est ouverte devant le tribunal de commerce si le débiteur est commerçant ou artisan, devant le tribunal de grande instance dans les autres cas. Le tribunal compétent est celui du lieu où se trouve le siège de l'entreprise.

Après examen de la situation du débiteur, le tribunal rend un jugement d'ouverture de redressement judiciaire. Le jugement peut faire l'objet d'un appel dans les 10 jours suivant la notification de la décision.

Si l'entreprise ne peut pas être redressée, le tribunal invite le débiteur à présenter ses observations sur l'ouverture éventuelle d'une liquidation judiciaire.

Période d'observation

La procédure de redressement judiciaire commence par une période d'observation de 6 mois maximum, renouvelable une fois, sur décision du tribunal (à la demande de l'administrateur, du débiteur ou du ministère public). Elle peut être exceptionnellement prolongée de six autres mois maximum à la demande du ministère public. Le tribunal doit, au plus tard dans les deux mois du début de cette période d'observation, confirmer la poursuite de celle-ci, s'il juge que l'entreprise dispose à cette fin de capacités de financement suffisantes. 

L’objectif du plan d’observation est, au moyen d'un bilan économique et social, d’évaluer la situation passée de l’entreprise en ce qui concerne ses dettes et les raisons conduisant à l’état de cessation des paiements. Il permet de déterminer sa situation actuelle et ses chances de récupération, d'établir un plan pour l’avenir ainsi qu'une nouvelle trésorerie. 

Contrairement à la procédure de sauvegarde, pendant le redressement judiciaire ce sont les experts nommés par le juge qui élaborent l’inventaire des biens de l’entreprise :

  • est obligatoirement nommé un mandataire judiciaire
  • un administrateur judiciaire si le débiteur emploie au moins 20 salariés ou réalise au moins 3 millions d'euros de chiffre d'affaires hors taxes. Il peut soit gérer seul l'entreprise, soit assister le dirigeant de l'entreprise.

Après avoir prononcé l'ouverture de la procédure, le mandataire vérifie les dettes et fait une publication dans le Bodacc. Les créanciers peuvent alors contester auprès du tribunal, durant 10 jours après la publication.

 

Les effets de l'ouverture de la procédure sont :

  • la continuité d'exercice du dirigeant, le débiteur conservant la gestion courante de l'entreprise
  • la prolongation des contrats en cours
  • la suspension des poursuites : les créanciers existant avant la procédure ne peuvent plus engager de poursuites en justice ni procéder à des saisies pour faire exécuter des décisions déjà obtenues. 
  • l'arrêt du cours de la plupart des intérêts et des majorations
  • la possibilité de reprise de l'entreprise par un tiers
  • la suspension de toute instance en cours tendant au paiement d'une somme d'argent ou à la résolution d'un contrat pour défaut de paiement. 

La période d'observation peut être interrompue à tout moment par le tribunal, qui prend l'une des actions suivantes :

  • la mise en place d'un plan de redressement
  • la cession partielle ou totale de l'activité
  • l'ouverture d'une liquidation judiciaire si la situation de l'entreprise ne peut pas s'améliorer
  • la clôture de la procédure s'il apparaît que le débiteur dispose de sommes suffisantes pour régler les frais.

Le plan de redressement

Le tribunal n'arrête un plan de redressement judiciaire que s'il considère qu'il existe une possibilité sérieuse pour l'entreprise d'être sauvée, selon la période d’observation. 

Sur la base du bilan économique et social, l'administrateur élabore avec le concours du débiteur le plan de redressement. La préparation du plan nécessite en principe la consultation des créanciers antérieurs. Ce plan de redressement judiciaire doit permettre la poursuite de l'activité de l'entreprise, le maintien de l'emploi et l'apurement du passif. 

Le jugement adoptant le plan de redressement est mentionné au Registre du Commerce et des Sociétés (RCS). Il doit préciser :

  • la désignation des personnes tenues de l'exécuter 
  • les perspectives d'emploi et des conditions sociales envisagées pour la poursuite de l'activité
  • la durée du plan qui ne peut excéder dix ans
  • la nomination d'un commissaire à l'exécution du plan, qui peut être le mandataire judiciaire
  • les perspectives de redressement
  • les modalités de règlement du passif et les garanties éventuelles que le débiteur doit souscrire pour en assurer l'exécution
  • la prise d'acte des délais et remises acceptés par les créanciers antérieurs lors de l'élaboration du projet de plan.

Les effets de ce plan sont alors :

  • la mise en place de l'assurance en garantie des salaires (AGS) pour les sommes dues en exécution des contrats de travail
  • la redéfinition des pouvoirs de l'administrateur pour la mise en œuvre du plan
  • le maintien du mandataire judiciaire jusqu'à l'établissement définitif de l'état des créances
  • la mise à disposition des biens et la fixation de leur prix sans avoir à solliciter d'autorisation pour le débiteur
  • le paiement des créanciers, sous réserve de l'admission définitive des créances, dans les limites prévues par le plan
  • le paiement de petites créances (trois cents euros maximum, dans la limite de cinq pour cent du passif estimé)
  • la poursuite de l'activité par le débiteur.

Le commissaire à l'exécution du plan établit un rapport annuel sur l'exécution des engagements du débiteur, qu'il dépose au greffe et communique au ministère public, et tient à la disposition de tous les créanciers.

Le plan en cours d'exécution peut être modifié par le tribunal à la demande du débiteur et sur rapport du commissaire à l'exécution du plan. Ainsi, si le débiteur n'exécute pas ses engagements dans les délais fixés par le plan, le tribunal prononce la fin du plan et la liquidation judiciaire.

Après dépôt au greffe du compte-rendu de fin de mission de l'administrateur ou du mandataire judiciaire, et l'approbation par le juge-commissaire, la clôture du redressement est prononcée par ordonnance du président du tribunal, non susceptible de recours.

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